Suite aux Journées de l’AFTE 2022, les 15 et 16 novembre, Trustpair vous propose de revenir sur certaines conférences de ces journées dans une série de 3 articles. Dans ce compte-rendu, nous nous intéressons à la manière dont le Trésorier est confronté au stress à travers le témoignage de deux professionnels, et aux bonnes pratiques pour faire face à cette pression.
Fatigués d’être des super-héros ?
La position de Trésorier n’est pas si éloignée de celle d’un super-héros. En effet, le Trésorier doit : gérer des imprévus, intervenir dans des situations complexes, prendre des coups, résister à la pression… Comment le Trésorier est-il soumis au stress et comment le gère-t-il ? C’est ce que nous allons voir à travers ce compte-rendu.
Étaient présents lors de la conférence :
- Odile Brandstetter, Vice President Treasury, Majorel
- Carole Deschandol, Dirigeante du cabinet d’accompagnement des transformations, Yumany
- Mickaël Djafarpour, Directeur du financement, de la trésorerie et du credit management, Andros
- Côme d’Aboville, Associé, Pilotine Advisory (modérateur)
- Chérifa Hemadou, Directrice financière, Virbac (modérateur)
Témoignage d’Odile Brandstetter
Situation initiale et origine du stress
Odile Brandstetter est Vice Président Treasury de la société Majorel, leader international de gestion de la relation client. La société est créée en 2019 suite à un partenariat entre les groupes Bertelsmann et Saham. A ce jour, Majorel est présent dans 44 pays, compte 78.000 collaborateurs et est coté en bourse.
Odile Brandstetter et ses équipes ont été confrontées à plusieurs situations complexes dont notamment le carve-out rapide de l’organisation des actionnaires en contexte de covid, l’introduction en bourse, la déclaration de la guerre en Ukraine, mais aussi un projet de fusion avec une entreprise qui a eu pour conséquence de perturber l’activité.
L’accumulation de l’ensemble de ses paramètres a représenté un exercice de résistance au stress au sein du service.
Relation au sein de l’équipe
Lorsque Majorel a initié le travail préparatoire à la fusion avec l’autre groupe, des objectifs de synergies ont été annoncés dans la presse. En d’autres termes, se posait la question des doublons avec l’équipe Trésorerie du groupe avec lequel nous devions fusionner.
Face à la situation, Odile Brandstetter a fait le choix de la transparence et du partage avec son équipe pour limiter au mieux le niveau de stress associé.
- Etre la plus authentique possible
“J’ai choisi de leur dire qu’il y avait une incertitude et qu’on ne savait pas combien de temps elle allait durer, et que nous devions donc nous concentrer sur ce que nous savions faire, comme la poursuite de nos projets, tels que la mise en place de notre TMS, ou la gestion de la stratégie de change.” – Odile Brandstetter, Majorel
- Partager les émotions
Il est essentiel de travailler sur l’esprit d’équipe et permettre à chacun de s’exprimer sur la situation.
“De mon côté je suis partagée entre enthousiasme et questionnement par rapport à l’incertitude. Et vous, comment vous sentez-vous par rapport à ça ? Voici ce que j’ai demandé à mon équipe.” – Odile Brandstetter, Majorel
Gestion du stress et partage de bonnes pratiques
Face à cette situation complexe et source de pression, Odile Brandstetter a pris conscience du danger et des conséquences que le stress peut avoir au quotidien, tant dans la vie professionnelle que personnelle.
Dans ce genre de situation, il ne faut pas se laisser submerger par le stress. Le travail et le management ne doivent pas déteindre sur la vie personnelle, et il est primordial de faire la part des choses entre ce qui compte vraiment ou non.
“Je me force à prendre conscience des signaux faibles pour vite me rendre compte de mon niveau de stress. Il faut savoir prendre du recul et remettre les choses en perspective afin de réussir à se détendre et continuer de porter les bons messages auprès des équipes.” – Odile Brandstetter, Majorel
Témoignage de Mickaël Djafarpour
Situation initiale et origine du stress
Mickaël Djafarpour est Directeur du financement, de la trésorerie et du credit management chez Andros. Andros est une entreprise française de l’industrie agro-alimentaire, spécialisée dans la transformation de fruits et de laitage. L’entreprise compte aujourd’hui 33 filiales et plus de 9.000 collaborateurs.
Dernièrement, l’entreprise a eu pour objectif de mettre en place une stratégie générale afin de cashpuller les pays européens, à savoir une trentaine de filiales en 1 an.
Le scope initial du service Trésorerie a donc grossi, tout comme l’équipe mais qui reste malgré tout à “taille humaine”.
“Faire 6 acquisitions en 1 an sont des sujets intéressants et challengeant, mais tout de même sources de stress.” – Mickaël Djafarpour, Andros
Relation au sein de l’équipe
Afin de ne pas laisser la pression s’installer au sein de son équipe, Mickaël Djafarpour a mis en place des dispositifs pour assurer un bon équilibre vie pro / vie perso au sein de son équipe.
“Le manager garde le mauvais rôle : c’est à moi de faire passer et de remonter les messages de l’équipe. Il faut garder le niveau de stress au niveau du management.” – Mickaël Djafarpour, Andros
Il est important de laisser de l’ownership à chacun, et de s’assurer que tout le monde puisse partager son point de vue. Favoriser un environnement de travail sain ne doit pas être négligé, et organiser des activités de groupes, comme des formations ou des team-building sont une solution pour y parvenir.
Gestion du stress et partage de bonnes pratiques
Les relations toxiques sont une réalité, et influencent véritablement l’équilibre entre la vie professionnelle et personnelle. Il faut accepter que l’on ne puisse pas travailler avec tout le monde, étant donné que nous avons tous des caractères et des visions différentes. La première étape pour améliorer sa situation est d’admettre que l’on est sous pression et d’identifier la source.
“La gestion du stress nécessite de trouver un juste-milieu et d’entretenir une balance saine entre vie pro / perso.” – Mickaël Djafarpour, Andros
Reconnaître les différents niveaux de stress
Lorsqu’on parle de stress, trois niveaux peuvent être identifiés :
- Le stress positif : zone de réalisation, de satisfaction et de stimulation
- L’absence de stress : manque de stimulation
- L’excès de stress : fatigue, dépression, ou dans certains cas un burn out
Le métier de Trésorier couvre un scope de missions extrêmement large, et gérer les imprévus ou des situations complexes est une réalité. La transformation de l’imprévu est bien réelle et peut très souvent être source de stress pour les équipes.
“L’objectif de chacun est de connaître ses limites. Nous n’avons pas les mêmes besoins, la même perception ou le même ressenti.” – Carole Deschandol, Yumany
Pour conclure : comment prendre conscience du stress et comment y remédier ?
“Il faut savoir prendre conscience des différents signaux faibles, propres à chacun, qui vous alertent et vous permettent de prendre conscience de votre stress.” – Carole Deschandol, Yumany
On parle alors de signaux :
- Émotionnels : vos émotions s’intensifient,
- Physiologiques : mal au ventre, difficulté à s’endormir…
- Cognitifs : difficulté à se concentrer par exemple,
- Comportementaux : se renfermer sur soi-même ou au contraire être plus agité.
Plusieurs éléments de résolution peuvent être mis en place pour vous aider à gérer le stress. Carole Deschandol met notamment l’accent sur trois pistes :
- Mettre en oeuvre la conscience de soi
- Faire appel à un coaching professionnel, souvent encadré par l’entreprise
- Faire un travail thérapeutique, hors du cadre professionnel.